Nathanaël Maillard : “Vous avez souvent fait le parallèle entre votre façon de jouer vos spectacles en acteur et le jeu des Gabin-Ventura… Et vous dites donc à juste titre que vous incarnez un personnage et que vous ne parlez finalement pas de vous. Cependant, vous ne mentez pas tant que ça, puisque vous êtes acteur, notamment avec les objets que vous présentez qui vous ont réellement été légués par vos maîtres ou qui sont réellement des pièces rares (gobelets de J. Paul, le gobelet en bois plein, certains jeux de cartes…). Cela ne vous aide-t-il pas à rester un acteur et à ne pas devenir un comédien, si tant est que vous l’évitez ? »
J’aime de toute façon mélanger les deux états. Comédien/acteur. J’aime jouer avec le vrai et la fiction : j’aime que les deux notions s’imbriquent le plus possible l’une dans l’autre et que le spectateur ne puisse plus distinguer la frontière. Cela étant dit, pour que mon personnage soit crédible, je fais en sorte de me sentir le mieux possible dans le rôle que je m’écris, donc d’être au plus proche de ma propre personne, autrement dit d’être plutôt « acteur » que « comédien ». Mais si, pour les besoins de mon scénario, je dois jouer plus la comédie, voire créer un personnage complet, je n’hésite pas. Disons simplement que je me sens plus à l’aise dans un rôle d’acteur, que de comédien. C’est plus sécurisant pour moi.
Tu as raison de parler de mes objets, qui font partie intégrante de mes personnages de scène. J’aime dénicher des objets que je côtoie dans ma vie de tous les jours et leur donner une raison de jouer avec moi sur scène. J’aime pouvoir prolonger ma vie ordinaire avec ma vie extraordinaire, sur scène. J’aime pouvoir ne plus trop savoir moi-même qu’est-ce qui est joué et qu’est-ce qui est une tranche de ma vraie vie. Par ailleurs plus le vrai se mélange à la fiction du récit -à l’aide par exemple d’objets qui appuient ma narration- plus mon jeu sera perçu comme authentique et plus je pourrai faire « décoller » mes spectateurs avec moi. C’est ma façon de voir les choses.