Quand nous allons au cinéma, il n’est plus nécessaire de nous initier au « langage cinématographique » : on vient voir un film, on sait ce que c’est qu’un film et on sait plus ou moins ce qu’on vient voir. Nous avons tous des raisons différentes d’aller voir tel ou tel film, MAIS nous n’entrons jamais dans une salle en nous disant: « Pourquoi sommes-nous assis face à cet écran blanc ? ». Nous venons juste profiter de cet art fabuleux qu’est le cinéma.
Avec la magie, la situation est tout autre. En tant qu’artiste prestidigitateur, notre enjeu est double : assurer le succès de notre spectacle et initier notre public au langage de la prestidigitation. Nous devons conquérir notre public, tout en l’éduquant à l’écriture de notre art. Rappelons-nous que dans les débuts du cinéma, le public venait voir des images qui bougeaient sur un écran et, un peu plus tard, des images qui parlaient ! Les premiers trucages de Méliès étaient donc magiques à deux niveaux pour le public : le cinéma en lui-même, en tant que « curiosité technique » et les possibilités qu’offrait le cinéma, en tant que « moyen d’expression ». Petit à petit, le cinéma a dépassé son aspect technique premier pour devenir surtout un moyen extraordinaire de raconter des histoires, le langage cinématographique a pris ses lettres de noblesse et bientôt le cinéma a été baptisé : le 7ème art. La magie n’en est pas encore là. C’est un peu comme si elle était encore à l’époque du cinéma muet… Mais à nous de la faire évoluer vers… le 8ème art ! (ou le 9ème, si une autre discipline nous prend la place d’ici là…). Notre rôle direct, sans plus d’artifices, est de donner progressivement un moyen direct au public de comprendre pourquoi il est en face ou à côté de nous. Nous devons faire en sorte de lui enlever de la tête l’idée qu’il vient juste pour se faire berner par nos techniques de magicien. La magie est un art, un des plus formidables moyens d’expression qui ait jamais existé ! A nous de montrer que le magicien est un artiste et non un démonstrateur de trucs plus énervants les uns que les autres ! Cessons de nous satisfaire d’être pris comme des « bêtes de foire », c’est flatteur pour l’égo mais néfaste pour l’évolution de notre art. Donnons envie à nos spectateurs de venir passer un moment de partage, comme quand il va au cinéma par exemple, ou au concert, ou au théâtre ! Ne lui donnons pas seulement l’envie de dire : « Qu’est-ce qu’il est fort ! Oh, il m’a bien eu. Je ne jouerais pas aux cartes avec lui !! ».
Merci Dominique pour cette belle et pertinente comparaison entre magie et cinéma.
Effectivement, nous nous en tenons trop souvent à la maîtrise technique, ce qui restreint la dimension de partage inhérente a notre art. (un peu comme si un réalisateur se contentait seulement d’apprendre le fonctionnement technique d’une caméra, sans explorer les possibiltés narratives du cinéma).
Par contre, si la magie entre au classement des arts, ce sera minimum à la 10ème place, la 8ème étant prise par la photographie et la 9ème par la bande dessinée. Mais seule la magie porte le surnom de « Reine des arts ».
Bonne journée à tous et à bientôt pour poursuivre cette réflexion importante.
Quand je lis cet article je me dis : « pourquoi n’y a-t-il pas beaucoup de personnes qui pensent comme vous » ? Comment peut-on être contre ce que vous dites dans ce petit article qui en dit pourtant tellement long? Je ne comprend pas ces gens!
Si tout le monde était comme vous, la magie aurait déjà sa 8ème (ou 9ème) place et depuis longtemps !
Amitiés et encore mille merci pour ce merveilleux blog que vous nous offrez ! que de richesses!!
Anthony, de Nancy