Je voudrais vous parler aujourd’hui du film Knock avec Louis Jouvet, d’après la célèbre pièce de Jules Romains. Il fait partie de mes films de chevet. Je le vois à peu près une fois par an. Il m’est indispensable.
Pour commencer, le film en lui-même est un vrai délice dans son analyse du genre humain. Voici le petit résumé du synopsis qu’on trouve sur Internet, ça vous aidera à comprendre ce dont il s’agit en gros (pour ceux qui ne connaissent pas encore ce chef-d’œuvre)
« Ayant choisi de quitter Saint-Maurice pour s’installer dans une plus grande ville (Lyon en l’occurrence) avec sa femme, le docteur Parpalaid décide de laisser sa place à Knock, jeune médecin de quarante ans. Durant le trajet vers Saint-Maurice, Knock interroge Parpalaid au sujet de la ville, demandant tour à tour si le village contient des sectes, des drogués, des maris trompés ou bien quelques épidémies çà et là. On apprend aussi que Knock doit de l’argent à Parpalaid (que les habitants du village appellent plaisamment Ravachol) que ce dernier lui a prêté pour s’installer. Le résultat de la conversation ne plaît guère à Knock, pour qui la clientèle dont il hérite lui semble être trop bien portante. Dès son arrivée au village, Knock appelle le tambour du village pour faire annoncer son arrivée et l’instauration de consultations gratuites le lundi. Parallèlement, il demande à l’instituteur, Bernard, de bien informer les gens sur ce que sont les microbes, germes et virus, et s’entretient avec le pharmacien Mousquet, qui confirme que Parpalaid lui envoyait bien peu de clients. Le succès des consultations gratuites est phénoménal et Knock est rapidement débordé. Il instaure les premiers traitements de longue durée tout en menant des investigations sur ses clients afin de prescrire des traitements coûteux à ses patients fortunés. L’hôtel du village devient une véritable clinique où les malades venus des quatre coins du canton viennent suivre les traitements de longue durée que Knock prescrit. Trois mois après son arrivée, Knock reçoit la visite de Parpalaid venu prendre des nouvelles. Ce dernier est abasourdi par les chiffres impressionnants présentés par Knock, et la pièce se termine sur une discussion entre Parpalaid et Knock, où l’on voit Parpalaid regretter son ancien poste. Knock réussit à faire douter son confrère de sa propre santé, et le résout à se mettre au lit : ultime victoire de son pouvoir sur autrui. »
Voici aussi deux petits extraits, histoire de rentrer le plus vite possible dans l’ambiance du film :
http://www.youtube.com/watch?v=5v2zf4a-EEs
http://www.youtube.com/watch?v=gMqEkyNnjbE&feature=related
Louis Jouvet… Ce mec n’est-il pas incroyable ? Vous me demandez souvent comment je fais pour trouver mes tours, comment je construis mes personnages et où je trouve le goût d’approfondir toujours mes recherches… Eh bien, voici une piste sûre. Son univers est une source d’inspiration intarissable pour moi… (comme Marlo pour d’autres… chacun son « Louis Jouvet »… comprendra qui veut !). C’est un Dieu. Un pur génie. Tout m’inspire chez lui. Quand je le regarde jouer, je frissonne, je pétille, je me délecte ! Et je retrouve encore plus de joie et de passion pour m’atteler à la tâche… Tiens, d’ailleurs, pendant que j’y pense, je ne saurais trop vous conseiller son livre « Le comédien désincarné ». C’est une bible dès lors qu’on s’intéresse aux méandres de la comédie pure. Ce bouquin fourmille de conseils tous plus précieux les uns que les autres pour « fabriquer la comédie » et la faire entrer en soi comme une seconde nature. Essentiel si vous êtes magicien ou comédien bien sûr et passionnant de toute façon pour les autres ! Vous verrez, en plus d’avoir une classe folle, cet homme avait décidement TOUT compris.
Et puis, ce que j’adore aussi dans ce film, c’est l’intelligence et la drôlerie des répliques. Bien sûr il y a la célèbre scène d’anthologie :
« Knock : Ne confondons pas. Est-ce que ça vous chatouille, ou est-ce que ça vous grattouille ? ».
Mais aussi par exemple : « Knock : Les gens bien portants sont des malades qui s’ignorent. ».
Ou encore « Knock : Car leur tort, c’est de dormir, dans une sécurité trompeuse dont les réveille trop tard le coup de foudre de la maladie. ».
Et un peu plus tard : « Scipion : « Et la bonne ? Elle enfile des perles ? ».
Moi je dis : c’est le pied. Je ne m’en lasse pas. Et pareil, ce sont là de grandes sources d’inspiration pour créer des situations dans mes spectacles. La subtilité des méthodes du Docteur Knock pour « créer sa clientèle » sont des exemples parfaits de techniques d’influence dont on peut user en magie… Réfléchissez-y, mais surtout, profitez bien de ce petit bijou du patrimoine cinématographique. Vous m’en direz des nouvelles !
Amitiés
Dominique Duvivier