Chers amis,
Comme régulièrement j’ai choisi cette semaine de publier un commentaire de l’un d’entre vous, en y insérant mes réponses.
A la semaine prochaine !
Bien à vous tous
Dominique Duvivier
Ohdaesu : (…) En ce moment je travaille sur l'écriture d'un spectacle de -comme tu appelles cela très bien- "close-up de scène" et je rame… Dur dur de créer des miracles dans les yeux de nos chers spectateurs. Tout ce que tu as commenté ici me redonne courage… Tu as tout à fait cerné ce que je ressens, mais tu as mis des mots dessus merci 😉 " Tu as compris que le public est toi quelque part. Tu as compris que tu dois savoir t’étonner toi-même, à travers les yeux de ce public qui rêve de voir ce que tu vas leur donner !"… C'est pour cela que créer me semble une tache extrêmement complexe et donc enrichissante, c'est d'une certaine manière se laisser aller à la schizophrénie au sens où le magicien recherche un truc, un stratagème pour créer une illusion mais en même temps il doit être convaincu que ça n'en est pas une sinon la magie s'estompe puis finit par disparaître aux yeux du spectateur… aux yeux du magicien… il n'est plus qu'un technicien… Rêvons même si nous savons que ce à quoi nous rêvons n'est qu'un rêve 😉
DD : Oui, dans une certaine mesure, ce que nous rêvons n’est bien sûr qu’un rêve, mais il faut aussi imaginer que ce que nous rêvons devient vivant grâce à notre art : la prestidigitation. Donc, en quelque sorte, notre rêve, il devient bien réel. Oui, nous savons bien que ce que nous créons est faux mais pour le public (et nous) c’est vrai, pour un instant… Et c’est là, si nous sommes un bon magicien (ou un bon vivant, ce qui revient un peu au même !) que nous entrons, par la grande porte, dans le rêve que nous pouvons donner au public.
O : (…) en somme tout cela revient à dire, selon tes propres termes, qu'il faut "démystifier pour mieux mystifier" et "se démystifier pour mieux se mystifier"… Diantre, fichtre, morbleu, je ne sais pas si tout cela est clair… qu'en penses-tu ? »
DD : Je crois que tout cela est fort clair si l’on prend la peine de pénétrer ce genre d’univers. Nous sommes sur la même longueur d’ondes alors « ça roule » comme on dit !
O : (Pardonne-moi cet innommable bordel dans mes idées mais à chaud voilà ce qui me vient :$)
DD : Moi, j’aime bien ce genre de bordel. Conserve cette spontanéité, elle devrait te permettre de créer des choses que d’autres ne pourront pas, trop occupés avec leur égo ou leurs sauts de coupe (voire les deux).
O : (…) Lorsque tu dis qu'il n'y a pas de truc tu veux dire en d'autre terme que "le truc", le questionnement du spectateur "comment ça marche ?" n'efface rien au miracle, il demeure ; le spectateur le boit (le miracle 😉 ), pendant une seconde, et pendant cette seconde il n'y pas de truc, c'est seulement dans un deuxième temps que la réalité reprend ses droits et impose le fait que "ce n'est qu'une illusion, il y a un truc! La magie n'existe pas, etc" ; l'éternel besoin cartésien de comprendre, le propre de l'homme en somme ;)Mais la magie durant le tour (la seconde de l'effet aussi courte soit-elle) fut et est toujours…? Je paraphrase surement mais je voulais m'assurer d'avoir bien compris :$ est-ce cela ?
DD : Oui c’est cela et bien plus encore. Si nous pouvons créer des choses merveilleuses tout en sachant qu’elles sont fausses, nous venons de créer un monde meilleur pour quelques secondes, voire le temps d’un spectacle complet. Ce qui revient à dire que nous sommes de vrais magiciens, d’une petite manière mais de vrais magiciens quand même car nous venons de donner du rêve et cela n’a pas de prix pour tous les autres. Ce rêve-là est bien réel, non ? Sans se prendre la tête ou « se la jouer », nous sommes dotés du pouvoir d’émerveiller et c’est pour cela que les gens ne nous regardent pas comme les autres. Donc nous sommes de vrais magiciens, tu comprends dans quel sens je veux le dire j’espère !
A méditer en tout cas…
A++
Dominique
Merci encore énooooooooooormément pour ta réponse et encore un immense respect Dominique ! 🙂
Je saisis en effet : je me permets donc de paraphraser (…bien je l’espère…) pour vérifier que mon bulbe est bien absorbé : nous sommes de vrais magiciens parce que l’espace d’une seconde (sans prétention aucune, car je pense pour ma part ne pas y être encore parvenu vraiment) nous créons une porte sur l’imaginaire, sur le rêve amenons ce dernier dans la réalité et cela est bien réel ; le fait que cela (ne…) soit qu’une illusion n’enlève rien au fait que quelques secondes avant la question « comment fait-il ? » le rêve fut et demeure réalité. Mais je m’emporte en réflexions pardonne moi encore cela…
Ca me fait penser au travail d’écriture dans lequel je suis en ce moment et qui me donne beaucoup de fil à retordre, je recherche autant que faire se peut la pureté des gestes, des routines,… Mais malheureusement je me trouve emprisonné, l’anus entre deux tabourets (;) ) : d’un côté, la conception d’un echainement, d’une routine du point de vue strictement technique et la magie pure, les deux jusqu’à maintenant ne semblent jamais se concilier, s’harmoniser. Quand je me retrouve face à une routine personnelle souvent je suis incapable de la voir autrement que sous un angle purement technique : résultat : si je me place comme spectateur je ne vois pas la magie (pourtant pour avoir testé sur des spectateurs, l’effet fonctionne et des fois très bien mais… pas sur moi donc…) Poubelle ! 🙂
Je me retrouve ainsi dans une situation d’impasse dans ma tentative de démarche créative…
Encore un immense merci cher Dominique pour tes réponses qui sont autant de réflexions extrêmement fécondes pour continuer à avancer ! 🙂 Merci pour tout ! 🙂